Expédition vers Edoran

Cela faisait des semaines, des mois même que nul en Edoran n'avait plus entendu parler de la Colonia Theopersis, cette colonie de persiens en exil établie sur une lointaine île volcanique sous protectorat edoran. Certes un navire de la marine avait bien passé quelques jours à Théopolis fin février avec à son bord des ingénieurs venus étudier les navires des colons et leurs équipements technologiquement plus avancés, notamment le radar et la radio, mais il n'était pas resté très longtemps et depuis personne n'avait plus eu de nouvelles.

Aussi c'est avec étonnement que les habitants de Lucera virent arriver dans leur port l'Aphtonos avec à son bord une dizaine de persiens dirigés par Théodoros Spoudaios, le n°3 du gouvernement persien en exil après Agesilaos, le Satrape, et Thémistocles Thalassan, le navarque et de facto taxiarque de la colonie.

Une fois à quai Théodoros et plusieurs de ses matelots descendirent tandis que deux hoplites restaient à bord pour monter la garde, avant tout pour éviter que des curieux ne montent à bord. Théodoros commença par se rendre auprès des autorités portuaires auxquelles il remit plusieurs courriers adressés à l'Empereur et au ministre des colonies.

Ces courriers décrivaient l'avancement du projet colonial, l'achèvement du grand complexe central de la colonie, la construction de la scierie et celle de la briquèterie, la découverte d'une pierre volcanique qui s'était révélée excellente pour fabriquer du béton hydraulique, le début de la construction du sanctuaire de l'Euchepetra où vivait le vieux prêtre Hagios Nikolaos.

Grâce à la découverte de cette pierre spéciale les persiens pouvaient construire très rapidement des édifices solides et fonctionnels qui les protégeaient bien des intempéries.

Mais les colons n'étaient pas encore auto-suffisants sur le plan alimentaire et avaient besoin d'outils et de nourriture. Aussi Agesilaos Archais demandait-il que l'Empire lui envoie un navire ayant à son bord 20 vaches, deux taureaux, 40 moutons et 20 chèvres ainsi que 10 chevaux et deux juments afin de créer un cheptel susceptible de se reproduire et de fournir nombre de précieuses ressources à la colonie. L'envoi de 40 porcs et 10 truies serait aussi fort apprécié car ces animaux ne nécessitaient pas beaucoup de soins et fournissaient beaucoup de produits : leur viande bien sur, mais aussi leur graisse et leurs os utiles pour l'artisanat. La laine des moutons serait aussi précieuse, comme le lait des vaches et des chèvres sans même parler du cuir des bovins.

Pour tout cela ils étaient bien entendus prêts à payer une certaine somme en or, puisant dans leurs réserves, mais leur gratitude envers l'Empire serait plus grande encore si ces produits leurs étaient fournis gratuitement...

Philibert Carnavon, en charge des affaires extérieures avait justement fait des demandes dans ses services pour avoir des nouvelles de Théopersis. L'annonce d'un navire dans la rade de Lucéra emplit le ministre de joie et de curiosité. Il avait eu la chance de le voir à sa première venue. Amateur de beaux engins, même si l'aérien restait son dada, il n'hésita pas une seconde et fit appareillé son dirigeable personnel et arriva rapidement à Lucera.

Dans le port, le navire faisait une nouvelle fois sensation. Les quais étaient noirs de monde ce qui n'allait pas sans poser quelques difficultés de déplacement. Le Ministre Carnavon espérait pouvoir photographié le navire depuis le môle, mais là aussi une foule nombreuse et bigarrée empêchait de bien voir l'étonnant batiment.

On fit savoir à Theodoros que le ministre était venu personnellement.

Théodoros ne s'attendait absolument pas à une réponse aussi rapide, doutant même que le ministre eut déjà reçu son courrier, mais il sut réagir comme il se devait en sortant de sa cabine pour accueillir le ministre dés sa montée à bord de l'Aphtonos tandis que les deux hoplites rendaient hommage au dignitaire edoranais. L'un deux escorta Philibert Carnavon et Théodoros jusqu'à la cabine de ce dernier où un autre membre d'équipage s'était empressé d'apporter une bouteille de vin de Thalassapersis, une des dernières existant encore hors des caves de la famille de Pombal, et des biscuits.

Invitant le ministre à s'assoir Théodoros servit le divin nectar et prit place à son tour pour écouter le ministre.

Grand amateur de vin, Philibert savoura le nectar que lui proposa Theodoros.
- Voilà bien longtemps que je n'avais plus bu un tel breuvage!! C'est digne des dieux...

Theodoros expliqua la situation au Ministre qui n'avait pas pu prendre connaissance des courrier qui lui avait été adressé ainsi qu'à l'empereur.
Bien conscient de l'importance que devait jouer Edoran dans cette affaire - la survie de ce protectorat édoranais pouvait en dépendre - Philibert promis a l'envoyé d'Agesilaos de faire tout ce qui était en son pouvoir pour venir en aide aux colons de cette petite île volcanique.

- Vous comprendrez que pour la gratuité je ne peux prendre la décision seul. Néanmoins je ne pense pas que le gouvernement d'Edoran soit opposé à vous venir en aide. Nous trouverons de toute façon une solution. Quoi qu'il en soit vous pouvez être sur d'une chose : le Très Saint Empire ne vous abandonnera pas.

Theodoros parut satisfait.

Theodoros se leva alors et se dirigea vers une armoire de sa cabine dont il sortit un coffret semblant assez lourd et un porte-feuilles de cuir noir rehaussé de fils d'or aux armes de la famille Archais et revint vers la table.

"Votre excellence, votre visite tombe je dois bien le dire, fort à propos. En effet j'avais reçu une mission secondaire du Satrape que je ne pouvais accomplir que si je rencontrais l'Empereur ou un membre du gouvernement.

Vous trouverez dans cette boîte un appareil rudimentaire mit au point par Bénodore Sophos, notre ingénieur, qui vous permettra de nous transmettre des messages à distance par la puissance de l'électricité et des ondes. Je ne connais pas vraiment les détails mais ce système vous permettra d'envoyer des messages que nous recevrons sur nos propres appareils. Le porte-feuilles que voici contient lui les plans de cet appareil et les instructions de productions, qui normallement sont dans les capacités de votre technologie. Egalement dans ce porte-feuille le code qui permet de nous transmettre le message, fait d'impulsions brèves et longues qui chacune représentent une lettre, un chiffre ou un caractère spécial. Ainsi lorsque vous aurez des requêtes ou des informations vous pourrez nous contacter sans problème. Pour ma part ma mission étant accomplie je vais lever l'ancre car j'ai une seconde mission à accomplir durant ce voyage, un pèlerinages en quelques sortes car j'ai reçu ordre de me rendre en Ioniapersis pour voir si des choses pouvaient y être sauvées et si des survivants seraient intéressés par l'idée de nous rejoindre.

Philibert fut intrigué par l'appareil. Il en avait entendu parler à propos des Persiens mais il n'en avait pas encore vu. Un appareil de ce type existait en Persis mais ne permettait pas les contacts lointains.

- Cher ami, faites bon voyage et surtout remettez nos salutations à Agesilaos.