Tribunal de Bonne-Espérance

La Terre du roi Henri n'ayant pas de tribunal, c'est à Bonne-Espérance que le procès se tiendrait. Le juge Pontien n'était pas réputé pour sa clémence. L'affaire était grave, le massacre d'une famille édoranaise, présentée comme la plus honorable qui soit. La famille Flambin massacrée à coup de feu, seule survivante, la fille Bénédicte. Pour tous l'affaire était entendue : des Aïnouts avaient commis le crime, des indépendantistes, membres d'une faction dure. Le procès serait peu suivi, mais la justice devait faire son oeuvre et la sentence s'annonçait comme exemplaire.

Tout semblait régler. Les enquêteurs de la Terre du roi Henri avaient amené les preuves incriminant les Aïnouts. Pour le juge Pontien, tout était clair et la sentence de même : la mort.

Le réquisitoire avait été implacable... rien ne laissait entrevoir autre chose que la culpabilité des Aïnoutes, bien que les preuves matérielles soient quasiment absentes. Pour l'accusation, les preuves étaient morales et ethniques, la culpabilité était sur le visage et dans les veines des Aïnoutes. Un racisme évident entachait la procédure judiciaire, mais ces pauvres bougres pouvaient-ils se défendre correctement, il ne parlait même pas vraiment bien la langue du procès et leur avocat, un jeune novice avait beau se démener comme un beau diable il ne faisait pas le poids face à l'accusation et notamment face à l'avocat général, maître Maut, un homme habile et rusé, rompu aux grandes affaires et aux procès retentissants. La presse était nombreuse : elle était divisée en deux, une petite partie, la presse de gauche et la presse généraliste du groupe Carnavon soutenaient les Aïnoutes alors que la presse régionale (très importante en Edoran où presque chaque ville compte deux voir trois quotidiens) et la presse nationale conservatrice avaient la plupart du temps déjà condamné les accusés.

le procès se terminait enfin. Il avait finalement duré plus longtemps que prévu... des informations avaient été apportées, toutes allant dans le sens de l'instruction, toutes à charge.

l'inspecteur Macé avait eu beau tout faire pour aider ces trois pauvres bougres, il n'avait rien pu faire. Il savait que les hommes étaient innocents... et pourtant ils avaient été condamnés à mort. Ils seraient sans doute vite exécutés... qui se souciaient de ces pauvres Aïnoutes?

Le recours n'avait pas été accepté, pour des Aïnoutes, la justice ne voulait plus perdre de temps et d'argent.
Les trois malheureux furent donc pendus...