Arrivée au Palais des Vents

Le voyage entre Zaramanca et Confolens, avait été long et éprouvant. Le convoi conduisant la Princesse Charlotte auprès de la Cour Impériale avait tantôt voyagé en train, tantôt par la route. La crainte et la méfiance avaient été les compagnons de route des voyageurs. Le soulagement les accueilli à leur arrivé dans la capitale chironnaise.

L'intendance de la maison impériale avait été prévenue du départ du convoi, et tout avait été préparé d'avance pour l'installation de la Princesse et de sa maisonnée. Charlotte, après avoir prit connaissance d'un pli qui lui avait été adressé, ordonna à son petit monde de prendre du repos. Les militaires eslagnols devaient être particulièrement soignés avant leur retour.

Après avoir répondu à la missive de la Princesse de Traceau, elle s'enquit de la disponibilité de l'Empereur à la recevoir. On lui fit comprendre qu'il était très occupé, ce qui ne l'étonna point, mais qu'il viendrait la visiter dès qu'il le pourrait...

Ah,


Vous voilà mon enfant. Que puis-je pour pour? Avez-vous fait bon voyage...

- Excellent, Votre Majesté. Grâce aux bons soins du Roi des Eslagnes, et à ses hommes de main, nous sommes arrivés sans encombre jusqu'à Confolens.

- J'en suis fort aise. Je remercierais Fernando-Luis de son dévouement envers nous... Sinon, avez-vous quelques projets en tête mon enfant ?

- Pour sûr, Majesté. J'ai entendu parler des atrocités commise contre les minorités en Transvalachie. J'aimerais pouvoir leur venir en aide, peut-être même rejoindre la mission humanitaire. Qu'en pense Votre Majesté ?

Altesse,


Il est hors de question que je laisse une demoiselle de votre accabit voyager en Transvalachie. Cela est bien trop dangereux.

- Majesté, je sais me défendre ! Je sais tirer au pistolet, manier une épée et monter à cheval comme un homme... Et puis, le sang des Lions coulent dans mes veines, je ne crains pas le danger !!

L'Empereur était heureux de voir un membre de sa famille s'intéresser aux politiques de l'Empire...surtout que l'on disait que le prince héritier ne cessait de "rencontrer" le Marquis Villeroy à toute heure du jour plutôt que de remplir ses tâches selon le protocole impérial......quelle déception!


Non, Il est hors de question qu'une demoiselle de votre qualité voit le massacre de la folie humaine. Vous pouvez cependant rejoindre la flotte qui croise au large des côtes transvalaches...cela remontra le moral de nos troupes...

La déception pouvait se lire sur le visage de la princesse.

- J'ai côtoyé la folie des hommes de bien plus près que Sa Majesté ne semble le penser...

L'Empereur leva les yeux vers elle, il semblait touché par les mots de la jeune femme. Elle continua :

- Dois-je donc me contenter de rester impuissante sur un navire de guerre, alors que tant de personnes auraient besoin d'aide à terre ?

- Mon enfant, je ne peux prendre le risque...

- Majesté, est-ce donc là les seuls desseins que vous avez à notre encontre ? Nous établir en poupée de porcelaine quand Votre peuple souffre et nécessite l'aide de toutes les bonnes volontés ?!

L'Empereur semblait courroucé de voir ainsi remettre sa décision en question.


Mon enfant,


La fougue de la jeunesse est louable, mais vous avez encore beaucoup à apprendre. Vous devez comprendre que la famille impériale n'est pas là pour relever ses manches et partir en croisade pour aider.


Nous sommes un symbole sur lequel le peuple compte. Nous sommes l'espoir d'un peuple. Tel est le poid de notre lignage....et le vôtre également...

Charlotte planta son regard dans celui de son Empereur et déclara :

- Pardonnez-moi, Majesté, mais il me faudra sûrement un certain temps avant de m'habituer à la perte de ma liberté...

Un léger sourire, amplement marqué d'ironie, passa sur le visage de la jeune fille, avant qu'elle ne poursuive :

- Qu'attendez-vous de moi, Majesté ? Simplement d'être une noble de plus dans votre cour?

Quand vous serez majeure, vous pourrez faire ce que vous voudrez, mais pour l'heure, j'exige le respect dans ma demeure.


L'Impératrice s'occupera de vous....

La jeune fille fit une rapide révérence, et poursuivit :

- J'espère ne pas avoir laisser penser à Sa Majesté que j'osais lui manquer de respect, cela n'est point dans mes habitudes, ni celle de ma noble maison. Je serais enchantée de faire la connaissance de Sa Majesté Impériale l'Impératrice dès son retour de Palogne. En attendant, suis-je autorisé à sortir du Palais à ma guise ?

Biensûr...avec une escorte...

- Je remercie Sa Majesté de l'attention qu'elle me porte... Puis-je disposer ?

Oui, mon enfant...

Le Comte Bezoukov, ambassadeur du Tsar à la cour d'Edoran, s'apprêtait à rentrer à Allancia, après que l'entrevue diplomatique de Confolens ait tournée en eau de boudin. Mais avant de quitter le Palais des Vents, il devait s'acquitter d'une mission dont le Tsar lui avait parlé de manière allusive, loin du style direct et bourru que l'Autocrate affectionnait.

C'est pourquoi, le matin du 31 mai 1911 (calendrier cathodoxe), le Comte Bezoukov tomba, par pure coïncidence, sur la Princesse de Fricard dans un des vastes et interminables couloirs du non moins vaste Palais des Vents, alors qu'il était absorbé dans la contemplation du buste de Charles Ier, louée soit sa mémoire.

Le Comte se plia en deux, son crâne chauve touchant presque le sol en une courbette bytanzine dont la mode s'était maintenue à la cour des Tsars, toujours en retard sur l'esprit du temps.

- Servus, Votre Altesse ! s'exclama le Comte, recourant à cette antique formule russlave qui, en un seul mot, signifiait que vous étiez non seulement l'esclave le plus dévoué de votre vis-à-vis, mais également son ami fidèle, son protecteur le plus dévoué, son conseil le plus avisé, son paillasson, même, s'il le fallait.

La Princesse, qui ne maîtrisait que l'édorannais et l'eslagnol, ne comprit pas le sens profond de ce mot. Mais répondit en faisant une élégante révérence, comme elle les maîtrisait si bien !

- Excellence... Enchanté de rencontrer l'envoyé de Sa Majesté le Tsar...

- Je suis également enchanté de rencontrer Votre Altesse, répondit le Comte Bezoukov.

- Pardonnez-moi, mais je ne puis m'attarder. Je me rend chez l'Impératrice qui vient de rentrer, et m'a dans l'instant convoqué !

Charlotte sourit au Comte, et rajouta :

- Je crois que nous savons vous et moi de quel sujet elle désire m'entretenir...