cérémonie à l'université

Les plus hautes instances de l'université d'Allancia étaient présentes dans le grand auditoire afin d'assister à la cérémonie officielle de présentation du nouveau recteur : Eumène de Cardie.

Philibert avait tenu à être présent dans l'assistance, en tant que simple spectateur, n'ayant aucune charge au sein de l'université ni même désormais au gouvernement.

Eumène s'était vêtu de sa plus belle robe académique, coiffé de sa plus belle toque, veillant à ce que sa chevelure abondante soit, une fois n'est pas coutume, disciplinée. Sa femme avait également fait le déplacement, ayant revêtu une magnifique robe noire dont la simplicité n'égalait que la splendeur, un discret diadème d'émeraude maintenant ses cheveux d'ébène et un collier orné d'un splendide rubis venant souligner son décolleté.

Plusieurs des assistants d'Eumène gravitaient autour de leur professeur, espérant tirer quelque gloire ou prébande de leur proximité avec le nouveau maître des lieux. Lui n'en avait cure, préférant saluer les collègues connus ou non qui venaient lui présenter leurs hommages.

Il salua au passage le chancelier sortant, un sourire complice aux lèvres : "Votre Excellence, j'ai cru comprendre que la commission avait bien reçu votre candidature et qu'une décision devrait être annoncée dans le courant de ce mois..."

Plus loin, un expert en physique appliquée l'approcha, demandant des financement pour lancer un programme de recherche visant à rattraper le retard sur un concurrent : "Et pourquoi n'essayeriez vous pas de voir avec mon assistant Hubert de St Hilaire si ses traductions des traités techniques de Persis ne pourraient vous donner quelques indices ? Leurs prouesses métallurgiques, surtout en Oropersis, sont après tout bien connues..."

Quelques pas plus loin un collègue l'aborda pour lui demander son avis sur un projet d'ouverture d'une nouvelle faculté de théologie merxiste-luniniste : "Tout est possible, mais il faudra avant cela défendre vos positions devant les commissions appropriées. Je suis recteur et non dictateur, je ne décide donc pas de tout... Ceci étant je ne vous cache pas un certain scepticisme. Mais je vous invite à prendre rendez vous avec mon office afin que nous puissions approfondir le sujet, je m'en voudrais de prendre position sur la base de simples sentiments quant à une discipline dont je ne maîtrise pas tous les enjeux."

Continuant son parcours vers l'estrade, il croisa le maire de la ville "Monsieur le maire, quel honneur vous me faites en vous déplaçant personnellement... J'espère que nous pourrons collaborer pour faire de l'Université une partenaire du développement d'Allancia !"

Un tintement de cloche annonça le début de la cérémonie. Chacun prit sa place, Eumène gagna le podium où l'attendait son prédécesseur. Celui-ci prit la parole.

Philibert attendait le discours d'Onésime avec impatience

Onésime vint à la tribune afin de prendre la parole.

Mesdames et Messieurs,

C'est avec un grand honneur que je vous accueille en ce grand auditoire de l'Université Impériale d'Allancia.
Cette institution compte parmi les plus prestigieuses de l'Empire et du Micromonde. Nos chercheurs, nos scientifiques et nos professeurs sont reconnus au dela de nos frontières.
Nous pouvons en être particulièrement fiers. Tout cela nous vous le devons chers amis.
Voici quelques années, j'ai pris la tête de cette honorable et vénérable institution. Ce n'était pas sans une certaine appréhension étant donné mon peu d'amour pour la chose publique, la politique - car cette fonction est politique - et l'autorité. Mes plantes n'exigent pas cela. Diriger une université n'est pas de tout repos, n'est certes pas non plus une sinécure mais c'est l'une des expérience les plus enrichissantes qu'il m'ait été donné de vivre ces dernières années.
J'ai le plaisir de voir me succéder un homme d'une remarquable intelligence, un scientifique de premier ordre. Un homme intègre et probre. Le Professeur Eumène de Cardie sera notre nouveau recteur. Dans la lignée des plus grands recteurs, nous pouvons être certains que celui-ci mènera à bien la barque universitaire et la guidera à travers les flots parfois tourmentés jusqu'à l'autre rive.

Sous les acclamations de l'assemblée le professeur Rekluz céda sa place au nouveau recteur, qui le remercia d'un signe de tête tout en l'applaudissant également. Le silence finit toutefois par revenir, chacun se demandant ce que dirait le nouveau recteur quant à sa ligne politique à venir :

"Alumni, concitoyennes, concitoyens, mes très chers amies et amis,

Une université est rendue grande par de nombreux éléments, par l'union de nombreuses forces, par le travail conjoint de nombreux esprits brillants. Mais comme tout navire a son capitaine, l'université a son recteur, force d'initiative, force de soutient, force de proposition, force de réalisation. Sans l'énergie que déploie son recteur pour assurer à son institution les meilleurs professeurs, les meilleurs équipements et les meilleurs étudiants, l'université périclite, décline comme si un mal la rongeait et l'affaiblissait.

Mais vous le constatez aujourd'hui tout autour de vous, dans les revues savantes comme dans la presse populaire, dans les salons littéraires comme dans les couloirs du pouvoir, jamais l'université d'Allancia n'a été aussi fameuse, aussi réputée, aussi grande. Et cela c'est grâce à l'homme que j'ai l'honneur d'avoir à mes côtés. Un homme aussi modeste que savant, aussi travailleur que brillant, aussi courageux qu'efficace, aussi à l'aise dans l'auditoire fasse aux étudiants qu'au coeur des jungles les plus impénétrables de nos colonies.

Prendre la succession d'un tel homme n'est pas un mince effort. Prendre la suite d'un homme qui a, a plusieurs reprises, reprit en main notre institution alors qu'elle connaissait une situation difficile est un défi dont moi-même je ne fais que découvrir l'ampleur.

Cependant, parce que l'Empereur, la Nation et vous me le demandez je vais m'atteler à faire tout mon possible pour si pas dépasser, du moins atteindre le niveau de succès de mon prédécesseur.

Pour ce faire il nous faudra affronter de nombreuses difficultés. Les difficultés financières, d'abord, nées du coût croissant des instruments nécessaires à la recherche. Les difficultés de recrutement de professeurs d'exception dignes de rejoindre les membres de votre noble assemblée, perles rares que toutes les universités cherchent à séduire. Les difficultés de recrutement d'étudiants doués, là aussi en raison d'une forte concurrence. Et puis, peut-être le plus important, la difficulté de maintenir notre excellence.

L'excellence n'est pas un voeu pieu, ce n'est pas un rêve inatteignable, mais plutôt le fruit d'un investissement commun permanent. L'excellence c'est bien sur la qualité de notre enseignement, notre capacité à transmettre notre savoir aux chercheurs de demain, nos futurs collaborateurs et collègues. L'excellence c'est aussi la qualité de notre recherche, qui attire sur nos scientifiques la félicité que procure le sentiment de reconnaissance d'une nation qui sait trouver en eux les femmes et les hommes qui apportent la gloire de la science à l'Empire.

L'excellence, s'est peut-être aussi, et surtout, la capacité à s'affranchir des dogmes et des idées reçues pour les questionner, et construire sur base de ces réflexions les fondations du progrès. Je mentionnais à l'instant nos trop rares collègues féminines. Pourtant les découvertes de ces rares femmes fréquentant les cercles du savoir montrent qu'elles ne sont pas sans ressources, et que se priver de leur génie serait se priver de la moitié de la capacité d'innovation de l'Empire.

De même nous veillerons à faciliter l'accès à l'Université à ceux que la fortune n'a pas favorisé, car la misère pécuniaire n'est pas synonyme de misère intellectuelle. L'exemple de ces nombreux Merxistes-Luministes krassieux pauvres mais produisant d'ingénieuses découvertes le montre à souhait. Là encore l'Empire ne peut se permettre de se priver d'un réservoir d'innovations, d'idées fraîches et de génie non encore exploité. Les accepter en notre sein c'est encore faire preuve d'excellence dans le domaine du patriotisme mais aussi de la morale.

Enfin l'excellence est aussi à rechercher le service rendu à la société. J'ai mentionné la nation, dont nous formons les plus brillants esprits et dont nous rehaussons la gloire éternelle, mais il y a aussi, plus près de nous, la ville. Allancia. Elle qui telle une mère nous héberge, elle sur qui nous devons veiller comme des filles et des fils bienveillant. Nous devons veiller de la façon la plus active à faire en sorte que le fruit de nos travaux bénéficie à la plus large population possible, afin une fois encore de contribuer à la grandeur de notre peuple.

Nous essayerons donc, durant notre mandat, de lutter chaque jour pour l'excellence, sous toutes ses formes, telles que nous venons de les présenter. Et en cela nous espérons marcher sur les traces du pro-recteur Rekluz. Je vous remercie."

L'assistance applaudit longuement le nouveau recteur

Le Recteur de Confolens et nouveau ministre, qui n'avait seulement pu qu'assister en partie à la cérémonie, applaudit son homologue allancien et le félicita avec sincérité.

- Puissent nos Universités renforcer leur collaboration, malgré les orientations différentes de leur thème de recherche et d'enseignement. Encore félicitations !

Eumène remercia le ministre d'un geste de la tête : "Monsieur le ministre, nous ne saurions tenir rigueur à un serviteur de l'Etat aussi occupé que vous l'êtes en cette période d'installation du nouveau gouvernement ! Je ne doute pas que des collaborations puissent être établies entre nos établissements, par exemple dans l'étude des paléopharmacopées où les expériences croisées de nos collègues ne peuvent qu'apporter d'intéressants résultats !